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Nous avions, dans le DigiWorld Yearbook 2016, souligné l’irruption de la blockchain comme un phénomène majeur. Il a perduré depuis. Dans la finance et dans quelques autres secteurs d’activité sont aujourd’hui expérimentés et développés des projets et des entreprises qui se fondent sur des principes nés avec les concepts imaginés pour l’infrastructure du Bitcoin.

Leur caractéristique commune est de pouvoir tenir des registres de transactions avec une très grande fiabilité et le bénéfice d’une architecture déconcentrée, sans serveur maître. Il ne paraît pas certain toutefois que les rêves libertariens d’un redéploiement des transactions sur le Net avec une nouvelle infrastructure logique, sans tiers de confiance et ouverte à toutes les applications (“smart contracts”), soient le modèle dominant des investissements en cours. Il reste à valider cette hypothèse que la blockchain s’applique principalement à des projets “privés” au sein d’une entreprise ou “collaboratifs” entre entreprises d’un même secteur.

Mais si la blockchain est restée très présente dans la chronique du numérique, d’autres innovations ont marqué l’actualité depuis notre dernière édition. Il y eut ainsi ces scènes étonnantes au cours de l’été 2016 où l’on voyait des jeunes (et moins jeunes) avancer dans les parcs publics, les rues ou les gares, le bras tendu avec leur smartphone, faisant la chasse aux Pokémons. La réalité augmentée a connu son premier véritable succès grand public,  devançant la réalité virtuelle aux dispositifs et aux contenus plus complexes.

Toutefois, la rupture la plus commentée au cours de ces derniers trimestres est très certainement à rechercher dans les développements de l’intelligence artificielle (IA) et dans ses possibles domaines d’applications. Mais qu’y-a-t-il aujourd’hui de nouveau dans cette notion d’IA qui date déjà de plusieurs décennies ? Il y a d’abord la donnée, les “lacs de données” (data lakes) rassemblés depuis quelques années et promis à s’étendre et se diversifier à travers la combinaison du cloud, de l’IoT et du big data. Pour exploiter ces quantités de données, il a fallu aussi des progrès considérables dans les composants pour mettre en œuvre des traitements parallèles efficaces. Contrairement aux systèmes déterministes basés sur des modèles prédictifs, dans lesquels ce sont les concepteurs du logiciel qui ont défi ni les paramètres qui peuvent distinguer un chat d’un chien, les systèmes les plus évolués d’IA sont basés sur des algorithmes de machine learning ou plus récemment de deep learning. C’est en traitant une quantité phénoménale de données qu’ils peuvent parvenir à distinguer un chat d’un chien, et ranger dans la même catégorie un doberman et un teckel. L’apprentissage est d’autant plus long que l’on cherche à étendre le domaine de compétences du système.

Pour un large public, le signal des progrès accomplis en matière d’IA a été, en mars 2016, la victoire d’AlphaGo (conçu par DeepMind, start-up rachetée par  Google/Alphabet) sur un des plus grands maîtres du jeu de go, Lee Sedol. La performance n’est pas mince quand on sait que ce jeu peut donner lieu à un nombre de combinaisons infiniment plus grand que les échecs. Et comme le soulignait récemment Cédric Villani, médaille Fields de mathématique, il n’est pas anodin de noter que la seule partie gagnée par le joueur sud-coréen l’a été en tentant un coup qu’il n’avait jamais essayé, qui n’était pas répertorié et qui est apparu alors aux yeux des observateurs avertis comme une bévue étonnante. Peut-être plus concrètement, l’émergence de l’IA comme un enjeu majeur dans nos industries est apparue dans la bataille que se livrent les leaders de l’Internet pour offrir une interface performante de reconnaissance vocale à nos smartphones, aux assistants numériques ou aux chatbots. Ce fut l’élément vraiment nouveau de la dernière édition du Consumer Electronic Show. Les projets d’Amazon (Alexa), de Google (Google Now), d’Apple (Siri) ou de Microsoft (Cortana) ne sont pas seulement d’offrir une alternative au clavier dans le search et la commande de votre smartphone ou de votre assistant. La bataille va être d’être retenu par des tiers à travers des API pour commander les équipements qui vous entourent, de votre machine à laver à votre voiture connectée.

Il va donc être intéressant d’observer dès cette année la progression de la qualité des interfaces vocales, encore perfectibles, leur degré d’ouverture et l’importance des accords signés avec les principaux acteurs du numérique, le niveau d’adhésion des consommateurs au-delà de la frange des geeks qui ont déjà commandé l’assistant Echo d’Amazon, et la probabilité que ces assistants virtuels deviennent une nouvelle cible de cyberattaques. Il s’agira aussi de savoir si ces interfaces susceptibles d’être de plus en plus efficaces en connaissant tout de votre accent, de votre emploi du temps, de vos centres d’intérêt et de vos goûts, ne risquent pas d’élever les switching costs et de renforcer les positions dominantes des leaders de l’Internet, qui concentrent une part très importante de la R&D dans le secteur de l’IA9. Naturellement, les perspectives d’applications de l’IA et du deep learning ne se limitent pas aux développements des interfaces en langage naturel et des assistants virtuels ; il va aussi s’agir d’observer par exemple la vitesse à laquelle pourraient se déployer en vraie grandeur les applications dans la finance (robAdvisors) et dans le secteur de la santé.

Cet article est extrait de l’édition 2017 du DigiWorld Yearbook

À propos du DigiWorld Yearbook

Le best of des analyses des équipes spécialisées d’IDATE DigiWorld, qui suivent toute l’année le développement des marchés télécoms, internet et médias à travers le monde.

Le DigiWorld Yearbook est publié en français et en anglais et est accessible en version papier et PDF

L’édition 2017 sera disponible le 6 juin aux tarifs suivants : Papier : 100 € HT et PDF : 65€ HT

Best-of DigiWorld Future 2016

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